Quand l’énergie Russe et Européenne joue entre ombre et lumière

Depuis le début de la terrible guerre en Ukraine, une succession de déclarations fracassantes ont été énoncées au sujet du gaz et du pétrole russes et de leur embargo pour sanctionner la politique de Vladimir Poutine. Hors des projecteurs, le pragmatisme s’appuie toutefois sur la raison d’Etat, dans l’obscurité.

Paradoxalement, plonger dans cette ombre pourrait apporter un éclairage sur une situation d’une complexité extrême.

 

Le scénario actuel n’est pas inédit. Durant la Deuxième Guerre mondiale, la Standard Oil, du magnat américain Rockefeller, vendait le pétrole indépendamment aux Américains, aux Anglais ou aux Allemands. Les pétroliers américains ne furent jamais condamnés pour leur complicité avec le gouvernement d’Hitler.

Livrer à toutes les parties permettait aux tankers de naviguer sans encombre. Le décor est posé.

 

Le pragmatisme d’Etat

Corollaire à l’invasion de l’Ukraine par Moscou, les importations d’énergies russes sont devenues impopulaires.

Sous les projecteurs, le premier ministre canadien, Justin Trudeau, fut le premier à annoncer le boycott du pétrole et du gaz russes. Lorsqu’un journaliste lui fit remarquer que le Canada n’achetait ni l’un ni l’autre, il bredouilla: "Ce geste envoie un message puissant aux autres nations!" Sa remarque dévoila l’existence d’une rhétorique opportuniste.

En réalité, depuis le début de la guerre, les importations de gaz russe par l’Europe ont atteint des niveaux très élevés. L’objectif est de remplir les réserves pour se prémunir d’une pénurie, même si, durant toute la guerre froide, l’URSS n’a jamais interrompu ses exportations d’hydrocarbures.

 

Le nucléaire reste dans l'ombre

Une partie du gaz russe consommé en Europe transite par l’Ukraine via l’entreprise publique Naftogaz. Pendant que le président Volodymyr Zelensky appelle les pays européens à cesser leur consommation de gaz russe, dans l’ombre, le gazoduc Brotherhood est toujours en service. Celui qui fait transiter l’or bleu à travers l’Ukraine est soigneusement épargné par les bombes. Pour Kiev, il permet de continuer à se chauffer, à cuisiner et à percevoir les frais de transit.

Du côté des Etats-Unis, la Maison-Blanche a également annoncé un embargo sur les hydrocarbures en provenance de Moscou. Hors des projecteurs, Joe Biden a recouvert de silence ses importations d’uranium russe qui approvisionnent, à plus de 20%, les centrales nucléaires américaines.

A quelques mois des élections, il n’est pas question que des black-out obscurcissent les chances démocrates.

Que penser du président Macron, qui a invité le géant du nucléaire russe Rosatom à s’asseoir à la table d’EDF afin de racheter les turbines nucléaires Arabelle à General Electric? Avant la guerre, le président avait promis la création de 1000 emplois à Belfort grâce aux ventes réalisées à 50% par Rosatom.

Du côté des pays de l’Est, l’entreprise russe s’occupe de la maintenance des centrales nucléaires alors qu’une partie des déchets, également ceux français, finissent stockés à l’air libre de la Sibérie.

 

Un esclavagisme énergétique

Le monde de l’énergie est d’une complexité extrême où ceux qui présentent des solutions simplistes font partie du problème. Les gouvernements se doivent de jouer entre ombre et lumière, telle l’Europe qui a accepté sa totale dépendance énergétique, face à la Russie, aux Etats-Unis et au Moyen-Orient, dans la mesure où elle peut vendre et proposer des produits ou des services à haute valeur ajoutée.

De plus, la doctrine européenne de paix et de stabilité, grâce au commerce et aux échanges, a atténué les impératifs de penser en termes géostratégiques et à long terme pour le plus grand régal de la Chine, des Etats-Unis et de la Russie. Nos emplois bien rémunérés et notre richesse n’ont d’égal que notre esclavagisme énergétique.

Au final, les sanctions économiques infligées à Moscou sont pensées pour provoquer un étranglement plus ou moins rapide du Kremlin voire la chute de Poutine. Si la lumière pouvait se satisfaire de cet épilogue, en Europe, l’ombre le redoute.

Comme disait le général de Gaulle «l’action, ce sont des hommes au milieu des circonstances».

 

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